Un peintre de Montparnasse expose à Penmarc'h


REGINALD SYDNEY WESTON

Un peintre de Montparnasse expose à Penmarc'h
au Centre de Découverte Maritime du 12 avril au 28 juin 2009
derrière le Phare d’Eckmühl
29760 Penmarc'h Tel : 02 98 58 72 87




Dans l'ancien phare de Penmarc'h devenu aujourd'hui Centre de
découverte maritime se tiendra du 12 avril au 28 juin 2009 une rare
rétrospective des peintures de Reginald Sidney Weston (1909-1967).
Un peu plus de quarante ans après sa disparition, cet artiste original nous
livre sa vision d'un monde minimaliste dans un lieu exceptionnel et
hautement symbolique. Un univers peuplé d'embarcations, de marines, de
natures mortes aux poissons, d'horizons marins abstraits, ou encore de
visages anonymes au regard fixe et insistant tels des têtes de proue. Peintre
de tous les lieux, partagé entre plusieurs patries, Reginald Weston a souvent
marqué son attachement à la Bretagne, son lien à la mer, son
extraterritorialité. C'est à une redécouverte thématique que nous convie
Yohan Madec, le commissaire de l'exposition. Profitant de l'architecture du
monument, il nous fait découvrir une à une les multiples facettes de l'oeuvre
de Reginald Weston. L'artiste fut internationalement apprécié de son vivant,
en témoignent les nombreuses expositions qui lui furent consacrées entre
1948 et 1960 (galerie Dina Vierny, musée Galliera, galeries Stiebel et
Bertagna à Paris, Redfern Gallery à Londres, galerie Georges Giroux à
Bruxelles, Temple of Aaron à St Paul Minnesota, F.A.R. Gallery à New York,
etc.). A de rares exceptions près, son oeuvre est demeurée à l'abri des
regards, du décès de l'artiste survenu en 1967 jusqu'en 2006, date à laquelle
la galerie Annandale de Sydney signait le retour sur la scène internationale
d'un important artiste profondément ancré dans le XXème siècle, dont
l'inspiration aura sillonné avec intelligence et sensibilité entre la géométrie
minimale de Paul Klee et la sincérité anti-mythologique de l'internationale de
Cobra.

Peintre anglais, né en 1909, Reginald Weston n'a que six ans quand son
père accepte un contrat que lui propose la Compagnie du Canal de Suez. La
famille quitte l'Angleterre pour l'Égypte. A l'âge de dix-sept ans, Reginald
Weston vient à Paris pour la première fois, mais le séjour sera court: il part
pour la Palestine en 1936 où il devient journaliste au Jerusalem Post tout en
continuant à peindre. En 1939, il expose à la Schlosser Gallery de Jérusalem.
C'est la première véritable exposition d'art abstrait en Palestine, inscrivant
Weston dans la mouvance avant-gardiste. Peu après, il accepte un poste de
professeur de peinture à la Bezalel Art School où il enseigne jusqu'en 1947,
date à laquelle il s’installe définitivement avec sa femme et ses deux enfants
à Paris pour y adopter la vie d’ artiste à temps plein dans le chaudron de la
créativité qu’était Montparnasse dans les années 40 et 50. Dina Vierny
l'expose dans sa galerie dès 1948. Le succès est immédiat: l'artiste vend les
deux-tiers des oeuvres présentées et reçoit un accueil enthousiaste de la
presse. Dès lors, les expositions vont se succéder en France aussi bien qu'à
l'étranger (Philadelphie, Londres, Bruxelles, New York, Tel-Aviv.)
En 1955, la compagnie maritime israélienne Z.I.M. lui confie la décoration
murale du paquebot Jérusalem. L'entreprise se révéle être un succès, quatre
autres navires d'envergure lui sont confiés, vastes chantiers qui l'occupent
jusqu'en 1964. Ces travaux ne le détournent pas pour autant de la peinture
ou du dessin de petit format sur support classique. Weston s'oriente vers des
techniques mixtes sur papier, s'engageant dans un style dépouillé, semiabstrait,
plus lyrique que réaliste. Si les premiers travaux de l'artiste sont
teintés de sentimentalisme, les oeuvres abstraites de la maturité se signalent
par leur harmonie, alliant délicatement la plastique aux coloris.
Reginald Weston disparaît prématurément en 1967.
Il fit dix-sept expositions entre 1939 et 1964.
Ces expositions les plus remarquables furent : Schlosser Gallery, Jerusalem
(1939), Galerie Dina Vierny, Paris (1948), Redfern Gallery, Londres (1950-
1960), Galerie Georges Giroux, Bruxelles (1958), F.A.R. Gallery, New York
(1960), une rétrospective majeure au Tel-Aviv Museum of Modern Art (1963)
et le Pavillon Helena Rubinstein (1963-1964).
Ces dernières exposition furent : Annandale Galleries, Sydney (2006), Le
Nautilus, Kerity-Penmarc’h (2007), Lavoir Vasserot et Ambassade du
Tourisme, Saint Tropez (2008) .
Il est présent dans les collections de prestigieux musées tels que le Musée
d’Israël à Jerusalem, le musée d’Art Moderne de Tel-Aviv et celui de New
York ainsi que dans de nombreuses collections privées en France, aux Etats-
Unis et en Israël telles que celle du Baron Elie de Rothschild, de M. De La
Rochefoucault ou du célèbre violoniste Isaac Stern.
Reginald Weston par Pierre Grunspan
A rebours,
J'ai découvert l'oeuvre de Reginald Weston.
Michael Weston, peintre et ami de très longue date, conservait certaines des
oeuvres de son père. Dans un classeur se trouvaient des paysages abstraits,
étirés à l'infini le long d'une impressionnante ligne d'horizon bleu azur, des
huiles diluées, diluées encore afin d'imprégner le papier tout en dichotomie.
Expression ambivalente du plein et du vide, peut-etre d'un questionnement
de l'artiste sur son oeuvre après une une vie bien remplie. Un avant-goût de
fin...
Malgré quelques rares huiles sur toile, abstractions tournoyantes ou
anguleuses, Reginald Weston ne semblait pas privilégier ce support, sa
noblesse, son classicisme. Un brin provocateur, il appréciait plutôt le papier,
l'isorel, le formica. Il aime certainement les pauvres et leur(s) manière(s).
Michael Weston avait confié à mon père la garde de quelques caisses en
bois. Restées pendant de nombreuses années fermées, leur contenu
demeura à l'abri des regards, soustrait au jugement de l'histoire. A l'instar
d'un récit biblique, lorsque vint l'heure de les ouvrir, il en fut ainsi. Des
oeuvres de petits et moyens formats en sortirent comme par enchantement:
des fleurs, des lampes, des poissons, des oiseaux, des pièces d'échec. Ces
peintures avaient été autant d'occasions pour Reginald Weston de
développer un langage très personnel qui allait des compositions tout en
retenues méticuleusement construites, en « fil de fer », propres aux années
50 et 60, jusqu'aux combinaisons lyriques où s'entremêlaient mouvements
impulsifs et exubérance de coloris. Toujours animé de cette profonde dualité,
l'artiste nous donnait à contempler des objets isolés, présentés avec
minimalisme, gages de sérénités, tout en nous étourdissant de compositions
semi-abstraites, baroques et violentes : couronnes, bouquets de fleurs,
marines... Un impressionnant panorama qui s'étendait du réalisme parisien
des années 50, à l'internationale de Cobra.


Deux caisses recélaient une série de visages anonymes, profils plus souvent
que faces, comme par discrétion. Mais constamment les yeux étaient
présentés de face et grand-ouverts. Très homogène, cet ensemble se
présentait comme autant d'acteurs au regard insistant, à l'image des
sculptures grecques archaïques ou de tombeaux étrusques. L'ambiguïté de
ce regard à la fois présent et absent, mêlé à une étourdissante palette de
coloris, me donnait le vertige. La juxtaposition de toutes ces compositions
placées à chant contre les caisses éventrées lors de leur redécouverte était
d'un effet saisissant, donnant à voir la violence d'une foule, tout comme celle
d'un jury inquisiteur. Il me fut aisément donné ce jour-là d'apprécier à quel
point ces visages avait été épargnés par les années. La seule idée qu'un
visage ne subisse pas les outrages du temps et un portrait ceux de la mode,
me semblait incongrue. C'est ces faciès sans âge, à mille lieues des clivages
culturels, au grand regard exigeant, à l'anonymat et la froideur revendiqués,
que je dois le souvenir d'une émotion demeurant intact aujourd'hui encore.
J'ai ensuite découvert une série de petites compositions qui étaient autant de
sujets inventés pour piéger la couleur, à l'image de la technique du cloisonné
sur métal. Des oiseaux, des fleurs, des poissons, dont le corps était parcouru
par des faisceaux de lignes fines ou épaisses, délimitant des territoires pour
diviser le spectre. La référence à Paul Klee me vient à l'esprit a posteriori;
mais je pense qu'il est bien présomptueux de vouloir rattacher l'oeuvre de
Reginald Weston à telle ou telle mouvance, ou d'établir des passerelles entre
ses créations et celles de certains de ses contemporains ou de ses
prédécesseurs.
Michael Weston semblait également découvrir l'oeuvre de son père. A
chacune de ses apparitions, il se présentait un petit paquet sous le bras, bien
emballé dans du papier de soie. Au compte-gouttes sont ainsi apparues les
premières créations de Reginald Weston et en particulier les peintures sur
verre de la fin des années 40, rares témoins encore vivants d'une
sensationnelles exposition qui s'était tenue en 1948 chez Dina Vierny.
Oeuvres parfois en souffrance, en raison de la fragilité de leur support et
surtout de l'inadéquation des techniques de conservation. J'avais la sensation
de remonter le temps, d'être confronté à des évidences archéologiques, telles
que les altérations induites par le vieillissement ou la raréfaction des pièces
les plus anciennes. C'est par ce premier souffle primitiviste que Reginald
Weston m'a déconcerté après m'avoir habitué à une grammaire bien établie,
voire même à une codification précise de son langage pictural.
Ce parcours à rebours de l'oeuvre de Reginald Weston me permet
aujourd'hui d'avoir une lecture presque transversale de son univers et
d'interpréter son évolution en terme de tengeances, quelle que soit
l'orientation chronologique choisie. Primitivisme, minimalisme, opulence,
dépouillement, universalité, vide absolu. Tous ces champs d'aspiration qui
sembleraient impossibles à intégrer dans la vie d'un seul et même homme,
ont été à un moment ou à un autre en ligne de mire du peintre, traçant un
itinéraire artistique polymorphe comme l'ont été bien souvent ceux des
grands artistes du XXème siècle.
Peintre anglais, travaillant à Paris, doué d'affinités et de nombreux liens avec
Israël, refusant d'être catalogué comme peintre juif, à mille lieues de toute
catégorie ou classification, Reginald Weston a cultivé la discrétion et
l'humilité; cela se voit et cela me plaît.







Les photos noir & blanc sont de Reuben Goldberg
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